Le 17 mai 1948, Ben Gourion annonce la création de l’Etat d’Israël. Le lendemain, ses voisins arabes lui déclarent la guerre, marquant le début du premier conflit israélo-arabe qui débouchera en 1949 sur une victoire écrasante d’Israël et l’agrandissement d’un tiers de l’Etat juif par rapport au plan d’origine. L’histoire contemporaine est depuis émaillée de conflits entre Israël et ses voisins arabes, le dernier en date étant celui qui oppose aujourd’hui Israël et le Hamas. La dimension territoriale est bien plus importante pour comprendre les causes du conflit, par rapport à la dimension religieuse.

Le projet politique de fonder un foyer national pour le peuple juif en Palestine – le sionisme – est théorisé en 1896 par Théodore Herzl, dans un contexte de vagues d’antisémitisme en Europe en cette fin de XIXe siècle – pogroms en Russie, affaire Dreyfus en France… Son édifice est fondé sur 4 hypothèses : « l’existence d’un peuple juif, l’impossibilité de son assimilation par les sociétés dans lesquelles il vit dispersé, son droit sur la « Terre promise » et l’inexistence sur cette terre d’un autre peuple qui aurait lui aussi ses droits » – hypothèses jugées fausses par les adversaires du sionisme.

Pour convaincre ceux qui dirigent alors le monde du bien-fondé de son projet, Herzl fait valoir à chacune des différentes puissances des arguments qui servent leurs intérêts : la Grande-Bretagne pour mieux s’enraciner au Proche-Orient face au concurrent français, la Russie pour freiner la contagion révolutionnaire dont nombre d’instigateurs sont d’origine juive, l’Allemagne pour se débarrasser d’une communauté juive jugée nombreuse et influente, l’Empire ottoman pour renflouer ses caisses en cédant la Palestine.

Le projet sioniste se formalise davantage à travers la déclaration en 1917 du gouvernement anglais au représentant des Juifs britanniques : « le gouvernement de Sa Majesté envisage favorablement l’établissement en Palestine d’un Foyer national pour le peuple juif » tout en précisant que « rien ne sera fait qui puisse porter atteinte aux droits civils et religieux des collectivités non juives existant en Palestine » (déclaration Balfour, du nom du ministre des Affaires étrangères).

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Les revendications des Juifs sur la Palestine trouvent leurs sources dans le lien qui les unit à la Terre Sainte, mais aussi à travers le mythe de leur expulsion de cette Terre par les Romains dans les tout premiers siècles de notre ère. Jusqu’au XIXe siècle, l’influence du judaïsme en Palestine reste très limitée et le nombre de Juifs sur le territoire ne s’élève qu’à une dizaine de milliers de personnes en 1835.

A partir de la fin du XIXe siècle débutent des migrations massives de Juifs en Palestine (aliyas), dans le contexte de violence antisémite évoqué plus haut. Entre 1882 et 1903, la première aliya draine 20 000 à 30 000 Juifs de l’Empire tsariste en Palestine, marquant les débuts d’une colonisation qui s’intensifiera tout au long du XXe siècle. 

Ainsi, alors que les communautés juives comptent 60 000 membres en Palestine en 1918 (soit moins de 10% de la population totale), la déclaration Balfour permet de tripler cette proportion en 20 ans. La victoire du nazisme en Allemagne stimule les migrations, avec l’arrivée en moyenne de 30 000 Juifs par an entre 1932 et 1939. Lorsque l’Etat d’Israël voit le jour, il comporte 650 000 citoyens juifs, soit 1/3 des habitants de la Palestine.

Lucas Giboin

Source : Alain Gresh, Dominique Vidal, Les 100 clés du Proche-Orient, Pluriel, 2011
Image : Gaza, 9 octobre 2023. Sameh – Nidal Rahmi